vendredi 10 février 2012

Marine Le Pen à Metz le 11 décembre 2011. Amalgame n°2 : la gauche, c’est la droite.


Bon, Marine le Pen fait un amalgame entre la gauche et le parti socialiste. Soit. Mais ce n’est pas tout : pour Marine Le Pen, non seulement le PS, c’est la gauche, mais la gauche, c’est la droite.
C’est le discours du FN, celui qu’on connaît depuis son père, Jean-Marie, quoi qu’elle en dise.

Elle fait premièrement cet amalgame en employant des pronoms ou des substantifs indéfinis.
C’est le cas lorsqu’elle prévient son auditoire que « Les autres ne valent pas mieux ! ». Et elle poursuit sur Nicolas Sarkozy : « Je vous rappelle tout de même, que Nicolas Sarkozy… ».
« Autres » est un pronom indéfini qui désigne un groupe indéterminé de personnes. Il y a une comparaison à travers l’outil comparant « mieux » chargé de marquer normalement une supériorité des « autres » sur le PS (c’est du PS qu’il est question avant). La comparaison, par définition, met en regard deux éléments distincts. Or, Marine le Pen, nie cette comparaison à travers la polarité négative « ne valent pas ». Et si la comparaison est niée ici, c’est pour marquer l’égalité entre la gauche et « les autres ». Il est intéressant en outre de noter que le discours passe des « autres » à Nicolas Sarkozy. Il y a ici un autre amalgame bien sûr: la droite c’est Nicolas Sarkozy. On s’attendrait à ce que Marine le Pen entame une liste en s’intéressant en premier à Nicolas Sarkozy. Or, elle n’évoque que lui : elle réduit bien « les autres » à Nicolas Sarkozy. Ce genre de tournures linguistiques marque bien la réduction proprement intellectuelle à laquelle se livre Marine Le Pen et à laquelle elle invite ses « amis ».
Elle emploie à nouveau des termes indéfinis plus loin lorsqu’elle évoque « ces gens là » qui « sont capables de tout dire, tout ! Et l’inverse de tout… ». A nouveau le substantif « gens » désigne un groupe de personnes indéterminées, un groupe vague. Et puis, l’agressivité saute à l’oreille avec le déterminant démonstratif « ces », hérité du « iste » latin qui désigne de façon péjorative quelqu’un qu’on dénigre. Il est soutenu par l’adverbe « là » qui met à distance (ce n’est pas « ci » pour « ces gens-ci »). Tout ça pour dire que la droite et la gauche sont dans le même sac. De la même manière, elle fait un amalgame réducteur sur les propos de ses adversaires politiques. Le pronom « tout » est à nouveau globalisant, surtout qu’elle ajoute « et l’inverse de tout ». Quels que soient les propos, ils sont noyés dans une masse indistincte.
Les adversaires de Marine le Pen sont ainsi un groupe indistinct aux propos indistincts (on y reviendra plus tard).
C’est vraiment le gloubi boulga de Casimir : une mixture à base d’ingrédients qui ne se marient pas ensemble et qui n’ont rien à voir. Sauf que Marine, ce n’est pas Casimir : elle fait peur aux enfants.

La deuxième manière d’exprimer un amalgame entre la droite et la gauche se fait en reprenant une image largement éculée, selon laquelle « le PS et l’UMP marchent main dans la main ». On la connaît cette expression. Alain Rey souligne que dès le 10ème siècle la main est évoquée comme l’organe du tact avec diverses implications symboliques. On l’a souvent lue ou entendue notamment à propos de la crise bancaire pour ceux qui évoquaient le fait que les banques et les États devraient « marcher main dans la main ». Si elle est si utilisée cette expression, c’est qu’elle exprime visuellement la solidarité entre ceux qui se « donnent la main ». Elle la traduit aussi de façon concrète par un geste familier voire intime (celui des amoureux). Concernant le PS et l’UMP, elle annule clairement les différences entre les deux et rend concrets les points communs que Marine le Pen leur confère.

Ainsi va l’amalgame chez Marine le Pen.